Le lecteur le moins averti de ce qu’est l’univers de Guimarães Rosa le constatera dès sa première approche de l’œuvre : les animaux y sont très présents. Mais il n’y a pas qu’eux : les plantes y occupent également une place éminente, ainsi que les pierres, les rivières, les éléments au sens large. Le vivant apparaît ainsi sous des formes diversifiées, multiples ; il s’impose à nous, lecteurs, à côté de l’humain. Il arrive qu’il ait des liens étroits avec lui, presque intimes, parfois au contraire ces liens sont distendus, comme si les données du monde sensible étaient étrangères, d’un autre ordre.
À côté de l’humain, vraiment ? Poursuivant sa lecture, le néophyte remarquera quelques anomalies. Par exemple, que certains animaux parlent ; qu’ils ont parfois un point de vue au sens narratologique du terme, comme les humains. Quel est donc le statut exact du vivant dans ces textes ? Dans ce qui suit on se restreindra aux animaux mais le questionnement pourrait valoir de façon plus globale, avec quelques nuances. On peut poser comme hypothèse de lecture que cette œuvre romanesque met en récit une continuité du vivant, qui traverse l’ensemble des trois « règnes », et s’étend peut-être au-delà.
Pour étudier cette continuité, qui intégrera progressivement d’autres éléments du monde réel, on proposera tout d’abord une brève typologie des animaux dans l’œuvre tout entière, avant de revenir sur les différentes modalités de leurs représentations, ce qui nous conduira presque naturellement à privilégier la question du langage, et donc le texte de « Mon oncle le jaguar ».
Téléchargez la conférence prononcée à l’occasion des Journées d’études Fictions animales de Nantes Université (26-28 janv. 2022).