Pygmalion est la plus forte et la plus conséquente des innovations musicales de Rousseau : un mélodrame, où les soliloques du personnage sont séparés par de la musique orchestrale.
Quatre ans après la création parisienne du Pygmalion, Guillemain ose mettre cette œuvre exigeante à portée du théâtre de boulevard en imaginant son avatar burlesque. Dans sa parodie, il substitue Arlequin au légendaire sculpteur des Métamorphoses d’Ovide dont s’était inspiré Rousseau.
Tandis que Pygmalion sombre dans la folie en devenant amoureux de sa resplendissante statue Galatée, celle qui inspire l’amour à Arlequin n’est qu’une poupée, tirée d’une vieille armoire du fond de sa boutique, qui occasionne les minauderies les plus comiques.
En rapprochant ces deux œuvres sœurs, Pauline Beaucé, à qui on doit la redécouverte d’Arlequin marchand de poupées, confronte niveaux populaire et classique de la langue musico-théâtrale, dans la grande tradition parodique, pratique caractéristique du spectacle musical populaire parisien au XVIIIe siècle.
Claude Dauphin, musicologue.
Pauline Beaucé, « Pygmalion de Jean-Jacques Rousseau, suivi de Arlequin marchand de poupées ou le Pygmalion moderne de Charles-Jacob Guillemain », Editions Espaces 34, 2012.