Le héros des Métamorphoses d’Apulée, Lucius, se rend en Thessalie, terre des magiciennes, afin d’approcher cet art et ainsi de percer des secrets interdits à des mortels profanes. C’est ainsi qu’il écoute, en chemin pour Hypata, le récit qu’Aristomène lui fait des mésaventures de son ami Socrate au livre I. La présentation que Socrate propose de Méroé comporte un certain nombre de métamorphoses accomplies par la magicienne qui change les hommes en animaux, tout en leur conservant leur esprit humain, comme Lucius l’expérimentera lui-même une fois devenu âne. Nous nous intéresserons à la manière dont Apulée caractérise son premier personnage de magicien du roman, en nous attachant en particulier à ses pouvoirs de métamorphoses qui lui permettent de forger des « humanimaux ». Nous verrons ainsi que Méroé, bien qu’elle soit la magicienne du roman qui accomplit le plus de métamorphoses, n’est cependant d’abord pas définie par ce pouvoir, ce qui permet de dresser d’elle un premier portrait topique. Ce n’est que par le biais des exemples que cite Socrate à son ami Aristomène qu’Apulée l’individualise. Or, cette individualisation repose sur des opérations de métamorphoses qui font de Méroé la créatrice d’êtres hybrides particuliers que le romancier compose à partir de son immense érudition . Dans cette perspective démiurgique, le cas de ses autres ennemis, notamment de Socrate, renouvelle ses pratiques et permet de poser un premier regard sur la justice humaine dans le roman.
Téléchargez la conférence prononcée à l’occasion des Journées d’études Fictions animales de Nantes Université (26-28 janv. 2022).