« J’ai coutume de dire », écrivait en 1980 le poète Eugène Guillevic, « que la traduction des poèmes n’est pas difficile, qu’elle est tout simplement impossible, mais que l’homme n’a jamais réussi que l’impossible (...) et raté le possible. » À l’opinion répandue qui veut que la poésie soit intraduisible, les poètes qui ont traduit d’autres poètes ont apporté un démenti éclatant, particulièrement tout au long du XXe siècle. Christine Lombez examine ici les cas exemplaires de quelques éminents poètes traducteurs : P. Albert-Birot, S. Beckett, Y. Bonnefoy, A. Guerne, Guillevic, P. Jaccottet, R. M. Rilke, B. Pasternak, H. Thomas, M.Tsvetaïeva, mais aussi des personnalités à redécouvrir comme Jean Prévost ou Armand Robin.
À première vue marginale, la traduction poétique pose en réalité des questions essentielles à la compréhension de l’art de la traduction en général. Dans quelle mesure le poème, une fois traduit, appartient-il encore à son auteur ? Le poète traducteur peut-il (et doit-il) s’effacer derrière celui qu’il traduit ? Entend-il le servir, ou cherche-t-il à s’approprier son œuvre ? N’est-ce pas lui-même qu’il recherche dans l’autre ? Et qu’advient-il quand un poète se traduit lui-même ?
Pour y répondre, Christine Lombez apprend à son lecteur à écouter les poèmes traduits, à déceler en eux les conflits secrets dont ils portent les traces. Son livre est aussi une magistrale réflexion sur la tension qui hante toute écriture poétique : écrire un poème s’apparente plus qu’on ne croit à un processus de traduction.
Une anthologie de réflexions de poètes traducteurs sur la traduction complète cet essai.
Éditions Les Belles Lettres, Collection « Traductologie », 432 pages, ISBN 978-2-251-70007-6