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Paroles autochtones. L’histoire, l’écriture dans le Canada francophone contemporain

Nantes, 14 au 16 mars 2024

jeudi 14 mars 2024, par Cécile Brochard

Du 14 au 16 mars 2024, l’espace Cosmopolis et le Cinématographe accueillent le festival « Paroles autochtones. L’histoire, l’écriture dans le Canada francophone contemporain ».

Organisé par Cécile Brochard (maître de conférences en littératures comparées, LAMO) et Yann Lignereux (professeur d’histoire moderne, CRHIA), en partenariat avec De la plume à l’écran, ce festival met à l’honneur pendant trois jours les auteurs et artistes autochtones francophones du Canada, à travers des conversations et des lectures, des rencontres avec le public, des projections de films et des tables-rondes avec les acteurs du monde éditorial attachés à la valorisation et à la diffusion des littératures et des productions artistiques autochtones.

Programme bientôt disponible en ligne

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Présentation de l’événement :

En consacrant la décennie 2022-2032 à la défense des langues autochtones à l’échelle internationale, l’UNESCO montre l’urgence et la nécessité d’une revitalisation des voix autochtones que les colonisations, les acculturations et les ethnocides ont longtemps placées sous silence. Cette volonté politique qui promeut la diversité culturelle trouve un écho particulièrement puissant sur la scène littéraire et artistique internationale actuelle, une scène qui témoigne du déploiement de productions qu’on pouvait encore, il y a peu, appeler « émergentes » ou « minoritaires ». Né de la volonté des écrivains et des artistes autochtones de se réapproprier des espaces de discours et d’action dont l’accès leur a longtemps été interdit par les institutions, ce dynamisme créatif est indissociable d’une réflexion éthique et politique sur les pouvoirs qu’ont la littérature et l’art d’écrire l’Histoire et, peut-être, de réparer les béances coloniales. En effet, qu’ils écrivent ou non dans une langue autochtone, qu’ils inscrivent leurs œuvres dans un prisme plus ou moins politique, écrivains et artistes autochtones interrogent les contours d’une « identité » par définition irréductible : notion mouvante, instable, difficilement circonscrite et de fait, impossible à définir, mais néanmoins omniprésente.

Au sein de cette activité internationale croissante, nous proposons de concentrer notre attention sur l’espace canadien francophone où se reconstruisent aujourd’hui ces « identités » autochtones. L’histoire canadienne est marquée par un processus de colonisation d’une extrême violence, depuis l’expropriation des terres jusqu’aux enlèvements des enfants autochtones, adoptés ou placés dans des pensionnats qui sévissent jusqu’aux années 1990. La parole s’est très lentement libérée à ce sujet dans l’espace public, et il fallut attendre 2015 pour que ce génocide culturel soit enfin documenté dans le rapport final de la Commission Vérité et Réconciliation. Si le gouvernement canadien s’attache actuellement à œuvrer en faveur de la reconnaissance de la violence coloniale et à mettre en place des modalités de réparation auprès des familles et des communautés autochtones, la violence du processus d’assimilation se fait encore sentir aujourd’hui dans la société canadienne.
Dans ce paysage social caractérisé par le déploiement des voix autochtones, écrivains et artistes des Premières Nations sont des acteurs majeurs de la réappropriation culturelle et de la lutte contre l’oubli. Investis d’un héritage historique complexe, ils font coexister culture marginalisée et culture institutionnelle et, ce faisant, réfléchissent à ce que peut signifier « être autochtone » au-delà des stéréotypes communautaristes auxquels ils sont parfois réduits. Victimes ou héritiers des tentatives d’ethnocides perpétrées à l’encontre des Premières Nations, ils offrent dans leurs œuvres un espace incomparable pour saisir la complexité d’une construction identitaire et ontologique souvent déchirée entre deux mondes. Depuis quelques décennies, ces auteurs et artistes autochtones canadiens parviennent à toucher massivement le grand public, y compris non-autochtone, notamment grâce à l’engagement d’éditeurs et d’acteurs institutionnels qui s’attachent à diffuser leurs œuvres et leurs créations sur la scène internationale. Un tel succès nous invite alors à interroger la réception de leurs œuvres par un très large public afin de comprendre ce que celles-ci nous disent sur le monde.

La littérature constitue un espace de prise de parole évident et particulièrement riche, ce dont témoignent la vitalité des parutions et l’écho que trouvent ces dernières auprès des lecteurs. Cet engagement littéraire s’inscrit dans un paysage artistique bien plus vaste où se côtoient également la peinture, le cinéma, la photographie, les nouveaux médias, la musique et les arts de la scène, entre autres. C’est cette pluralité des arts autochtones actuels que nous souhaitons mettre à l’honneur à travers plusieurs rencontres avec des artistes et des écrivains des Premières Nations canadiennes francophones. Dans une démarche interdisciplinaire croisant l’Histoire, la littérature et les arts, nous voulons interroger les imaginaires identitaires et ontologiques façonnés par les œuvres autochtones contemporaines, non seulement pour en montrer la densité et la complexité, mais également pour en souligner les fractures et les reconfigurations. Réinvestir des lieux symboliques, sonder des tensions discursives et, peut-être, reconstruire un sens en donnant direction et signification à des expériences historiques particulièrement traumatiques : tels sont les enjeux poétiques et politiques portés par ces œuvres contemporaines. Cet événement organisé du 14 au 16 mars 2024 dans l’Espace Cosmopolis et dans divers lieux culturels nantais souhaite ainsi offrir une large place aux paroles des écrivains et des artistes autochtones, pour contribuer à saisir ce qui permet de « faire société » après les colonisations.

Dans cette perspective, plusieurs axes de réflexion pourront être envisagés :

Penser l’histoire :

  • Dans quelle mesure la littérature et les arts permettent-ils l’émergence d’une autre histoire jusqu’ici tue par les pouvoirs en place ?
  • Comment la création offre-t-elle un espace pour se penser aujourd’hui dans l’Histoire ?

Raviver la mémoire :

  • Comment se déploient les héritages multiples des écrivains et des artistes des nations autochtones, en particulier lorsqu’ils ont subi une acculturation presque totale ?
  • Une réappropriation des langues et des mémoires s’opère-t-elle ? Les langues autochtones perdues dans l’expérience tragique de la colonisation et de l’acculturation émergent-elles aujourd’hui en création ?

Construire l’identité :

  • Si le rapport aux territoires est rompu ou perdu, comment le sentiment d’être « autochtone », terme qui étymologiquement relie le soi à la terre, perdure-t-il ?
  • Comment se définir en tant qu’auteur, artiste « autochtone », sachant que ce terme englobe (et contribue peut-être à effacer) une très grande diversité culturelle ?

Être dans le monde :

  • En quoi les ontologies non dualistes souvent portées par les cultures autochtones offrent-elles un espace imaginaire particulièrement fécond pour penser le rapport de l’être humain au monde et à l’environnement ?
  • L’engagement dans la défense des territoires entre-t-il de fait en résonnance avec les enjeux écopoétiques actuels ?

En partenariat avec l’Espace international Cosmopolis, le Cinématographe, De la Plume à l’écran, la Géothèque et Prun’Radio.

Avec le soutien de Nantes Université, des laboratoires CRHIA et LAMO, du Pôle Humanités, de l’Axe SHS, de Nantes Métropole et du Centre culturel canadien.

Portfolio




À propos :

Cécile Brochard

Maître de conférences en Littératures comparées, Nantes Université.
Membre associée du LASLAR (Université de Caen Normandie) et du CRIIA (Centre de recherches ibériques et ibéro-américaines, Université de Paris Nanterre)

Voir en ligne : "Littératures autochtones (Amérique-Australie). Actualité de la recherche et ressources"

Courrier électronique : Cécile Brochard


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